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.Plusieurs jurés, apparemment de laconnaissance de ces dames leur parlaient et semblaient les rassurer."Voilà qui ne laisse pas d'être de bonaugure", pensa Julien.Jusque-là il s'était senti pénétré d'un mépris sans mélange pour tous les hommes qui assistaient au jugement.L'éloquence plate de l'avocat général augmenta ce sentiment de dégoût.Mais peu à peu la sécheresse d'âme deJulien disparut devant les marques d'intérêt dont il était évidemment l'objet.Il fut content de la mine ferme de son avocat.Pas de phrases, lui dit-il tout bas comme il allait prendre la parole.Toute l'emphase pillée à Bossuet, qu'on a étalée contre vous, vous a servi, dit l'avocat.En effet, à peine avait-il parlé pendant cinq minutes, que presque toutes les femmes avaient leur mouchoir àla main.L'avocat, encouragé adressa aux jurés des choses extrêmement fortes.Julien frémit, il se sentait sur lepoint de verser des larmes."Grand Dieu! que diront mes ennemis?"Il allait céder à l'attendrissement qui le gagnait, lorsque, heureusement pour lui, il surprit un regard insolent deM.le baron de Valenod.CHAPITRE XLI.LE JUGEMENT 276 Le Rouge et Le Noir"Les yeux de ce cuistre sont flamboyants, se dit-il; quel triomphe pour cette âme basse! Quand mon crimen'aurait amené que cette seule circonstance, je devrais le maudire.Dieu sait ce qu'il dira de moi, dans lessoirées d'hiver, à Mme de Rênal!"Cette idée effaça toutes les autres.Bientôt après, Julien fut rappelé à lui-même par les marques d'assentimentdu public.L'avocat venait de terminer sa plaidoirie.Julien se souvint qu'il était convenable de lui serrer lamain.Le temps avait passé rapidement.On apporta des rafraîchissements à l'avocat et à l'accusé.Ce fut alors seulement que Julien fut frappé d'unecirconstance: aucune femme n'avait quitté l'audience pour aller dîner.Ma foi, je meurs de faim, dit l'avocat, et vous?Moi de même, répondit Julien.Voyez, voilà Mme la préfète qui reçoit aussi son dîner, lui dit l'avocat en lui indiquant le petit balcon.Boncourage, tout va bien.La séance recommença.Comme le président faisait son résumé, minuit sonna.Le président fut obligé de s'interrompre, au milieu dusilence de l'anxiété universelle, le retentissement de la cloche de l'horloge remplissait la salle."Voilà le dernier de mes jours qui commence", pensa Julien.Bientôt il se sentit enflammé par l'idée du devoir.Il avait dominé jusque-là son attendrissement, et gardé sa résolution de ne point parler; mais quand leprésident des assises lui demanda s'il avait quelque chose à ajouter, il se leva.Il voyait devant lui les yeux deMme Derville qui, aux lumières, lui semblèrent bien brillants."Pleurerait-elle, par hasard?" pensa-t-il.-Messieurs les jurés,"L'horreur du mépris, que je croyais pouvoir braver au moment de la mort, me fait prendre la parole.Messieurs, je n'ai point l'honneur d'appartenir à votre classe vous voyez en moi un paysan qui s'est révoltécontré la bassesse de sa fortune."Je ne vous demande aucune grâce continua Julien en affermissant sa voix.Je ne me fais point illusion, lamort m'attend: elle sera juste.J'ai pu attenter aux jours de la femme la plus digne de tous les respects, de tousles hommages.Mme de Rênal avait été pour moi comme une mère.Mon crime est atroce, et il fut prémédité.J'ai donc mérité la mort, messieurs les jurés.Quand je serais moins coupable, je vois des hommes qui, sanss'arrêter à ce que ma jeunesse peut mériter de pitié, voudront punir en moi et décourager à jamais cette classede jeunes gens qui, nés dans un ordre inférieur, et en quelque sorte opprimés par la pauvreté, ont le bonheur dese procurer une bonne éducation, et l'audace de se mêler à ce que l'orgueil des gens riches appelle la société."Voilà mon crime, messieurs, et il sera puni avec d'autant plus de sévérité, que, dans le fait, je ne suis pointjugé par mes pairs.Je ne vois point sur les bancs des jurés quelque paysan enrichi, mais uniquement desbourgeois indignés.Pendant vingt minutes, Julien parla sur ce ton; il dit tout ce qu'il avait sur le coeur; l'avocat général, quiaspirait aux faveurs de l'aristocratie, bondissait sur son siège; mais malgré le tour un peu abstrait que Julienavait donné à la discussion toutes les femmes fondaient en larmes.Mme Derville elle-même avait sonmouchoir sur ses yeux.Avant de finir, Julien revint à la préméditation, à son repentir, au respect, à l'adorationfiliale et sans bornes que, dans des temps plus heureux, il avait pour Mme de Rênal.Mme Derville jeta unCHAPITRE XLI.LE JUGEMENT 277 Le Rouge et Le Noircri et s'évanouit.Une heure sonnait comme les jurés se retiraient dans leur chambre.Aucune femme n'avait abandonné saplace; plusieurs hommes avaient les larmes aux yeux [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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